L’infection au COVID est aussi une maladie vasculaire
Andréas Bikfalvi, Directeur du Laboratoire Inserm U1029, LAMC, soumet un projet qui concerne l’étude de la régulation de ACE2, récepteur du coronavirus dans les vaisseaux sanguins et secondairement dans l’épithélium bronchique. « Pour cela, nous utiliserons notre système 3D artificiel que nous avions publié en 20191. Nous avons pu reconstituer dans notre système un vaisseau artificiel comportant une couche de cellules endothéliales interne et une couche de cellules musculaires lisses. Ce système est contractile, perfusable et activable. Il a par ailleurs un transcriptome correspondant plus fidèlement à la situation in vivo. » Il ajoute qu’il a été observé que les personnes ayant été traitées avec des inhibiteurs des ACE (Enzyme de Conversion à l’angiotensine) avaient un risque potentiel plus élevé de développer une forme grave de la maladie. Par ailleurs, il est avéré que l’infection au COVID est aussi une maladie vasculaire. Ce projet – qui associe Pierre Nassoy (Institut Optique), mais aussi le CHU de Bordeaux (Fabrice Bonnet, service de médecine interne et maladies infectieuses et Marie-Edith Lafon, service de Virologie) – a donc différents buts : élucider le rôle et le mécanisme d’action des inhibiteurs de ACE1 sur l’expression de ACE2, tester si les inhibiteurs de ACE favorisent l’infection par le Covid-19 et enfin, valider le modèle comme plateforme d’étude pour explorer l’effet des inhibiteurs de l’interaction entre le Covid-19 et ACE2.
Spécialiste à la fois du cancer et de l’angiogenèse, le laboratoire d’Andréas Bikfalvi possède une double compétence : vasculaire et cancer, ce qui lui permet de participer aux recherches sur le Covid-19.
Un virus qui développe 2 sites de clivage
Depuis de nombreuses années, Majid Khatib, Directeur de recherche INSERM dans l’Unité U1029, étudie plus spécifiquement les mécanismes de maturation des protéines dans le cancer et l’inflammation par des enzymes protéolytiques.
Majid Khatib explique qu’il a récemment été démontré qu’une glycoprotéine du Covid-19 présente des sites d’un clivage protéolytique par les convertases, et notamment la convertase furine. « Le clivage des glycoproteines par les convertases est un processus utilisé par de nombreux virus pour infecter les cellules cibles (Ebola, HIV, etc...). Notre équipe travaille sur ces enzymes depuis des années afin d’identifier leur rôle dans l’inflammation, le cancer mais aussi l’infection virale. Grâce à des outils bio-informatiques (Virtual ligand screening) et en se basant sur la structure de la furine, nous avons identifié 1000 petites molécules susceptibles de bloquer l’activité de la furine », précise-t-il.
Par la suite, son équipe a testé d’autres molécules identifiées par la stratégie de repositionnement de médicaments, « Nous en avons identifié une centaine, seules 38 ont pu être trouvées et achetées, une dizaine a été testée in vitro et 3 bloquent l’activité de la furine (brevets déposés). Nous avons donc des molécules à tester sur le clivage de la glycoprotéine du Covid-19 et par conséquent l’infection. »
Afin que ces recherches puissent aider dans la lutte contre le Covid-19, 50 molécules ont été envoyées dans un laboratoire à Marseille (Etienne Decroly), en attendant que le reste des autres molécules soient testées sur le site bordelais.
1 Andrique et al, SCIENCE Adv, 2019, https://advances.sciencemag.org/content/5/6/eaau6562.abstract